5 trucs à savoir sur la photographie culinaire
Elle est partout, et pourtant quasiment invisible. Elle est l’arme privilégiée des chaînes de restauration et des livres de recettes, mais on a souvent l’impression qu’elle est là simplement pour décorer. La photographie culinaire est un métier à part entière ; mieux, elle s’est élevée au rang de création artistique dans sa manière de sublimer bons petits plats et ingrédients divers. Voici 5 trucs pour tout savoir !
1. Le rôti à la diable est dans les détails
Tout le génie de la photographie culinaire repose sur sa parfaite discrétion : comme le diable, son grand talent est de faire croire qu’elle n’existe pas. Pourtant, elle est partout sous nos yeux : publicités, emballages, recettes, blogs culinaires, menus au restaurant… Tous les types de supports cherchent à capter l’intérêt des consommateurs via les possibilités offertes par le 8e art.
L’objectif ? Attirer l’attention du public et l’appétit du spectateur à l’aide d’un mélange de beaux aliments, de douces couleurs et d’une lumière parfaite. Pour cela, la photographie culinaire déploie des techniques de mise en scène où les comédiens sont remplacés par les ingrédients : on traite une salade comme Audrey Hepburn et un hamburger comme Humphrey Bogart.
Vous vous êtes souvent demandé pourquoi votre double cheese ne ressemble en rien à la photo perchée au-dessus du comptoir ? C’est parce que la photographie culinaire a ses astuces techniques qui mettent en valeur le produit, tout en donnant l’impression qu’il reste naturel. Parce que tout est fait pour que vous pensiez que le plat photographié a été pris sur le vif.
Crédit photo : http://www.nbphotographie.net/
2. La photographie culinaire a évolué avec le temps
Au commencement, il y a la photographie culinaire primitive : un plat bien sage, des couverts suffisamment écartés de l’assiette, une prise de vue en hauteur de manière à englober l’ensemble des aliments. La photo des vieux livres de recettes de maman.
Le développement de la photo alimentaire accompagne celui des besoins publicitaires. Pour vendre des plats cuisinés, des barquettes de viande ou des cageots de légumes, il faut encore donner envie aux consommateurs de les acheter et de les manger. L’image doit générer le désir, alors elle doit être parfaite, concurrencer les photos des stars du cinéma.
En conséquence, angles de vues et échelles de plans sont venus s’ajouter à la technique traditionnelle. La lumière est devenue essentielle, ainsi que le rendu des couleurs. Puis, les publicitaires ont commencé à toucher à la nourriture elle-même, en augmentant la hauteur des plats (le fameux double cheese qui paraît énorme sur la photo), en les présentant en couches pour favoriser les gros plans.
3. Quand la photo devient un commerce
Bien sûr, le fait que l’artifice se soit emparé de la gastronomie n’est pas une évolution complètement gratuite. À l’origine, il y a un besoin commercial qui s’est brillamment inspiré de la photographie artistique, utilisée par les publicitaires à plus ou bon escient. Aujourd’hui, les ramifications sont multiples. Et l’engouement indiscutable.
D’abord, la photographie culinaire s’appuie sur le regain d’intérêt de toute une frange de la population pour la gastronomie et les préparations alimentaires. Tendance matérialisée par le succès des émissions culinaires – de « Un dîner presque parfait » aux concours de cuistots en prime time – et le goût retrouvé pour les petits plats confectionnés en prenant son temps (le slow food, antithèse du fast food).
Ensuite, à l’ère de l’Internet 2.0, la présentation des recettes est plus que jamais un argument de vente pour les bloggeurs alimentaires et les applications gastronomiques. Les amateurs franchissent le cap de l’édition (la bloggeuse Chef Nini a publié son livre sur la photo culinaire) et l’application Tender propose de choisir des recettes en images comme on sélectionne un candidat au mariage.
Enfin, s’il y a un business de la photographie alimentaire, il y a aussi un marché de l’apprentissage des ficelles du métier. Nombreux sont les ateliers professionnels qui proposent de prendre des cours. Avis à ceux qui voudraient rejoindre l’armée des artistes de la bouffe et aux amateurs de food porn qui aiment à manger en regardant.
Crédit photo : http://gillesbertrand.fr/
4. La photographie culinaire, c’est de l’art ou du cochon ?
Progressivement, le plat cuisiné s’est transformé en produit à grand spectacle, bourré de maquillages et d’effets spéciaux. Prendre un bon cliché de canard à l’orange nécessite désormais l’équivalent du budget du premier Star Wars de 1977.
Les métiers de la photographie culinaire font penser à une production artistique de grande ampleur : photographe, directeur artistique, styliste culinaire (qui peint et met du vernis sur les aliments), accessoiriste… C’est presque un tournage de film publicitaire. Les petits plats sont adoubés comme des peintures de Delacroix, les pâtisseries se gonflent d’arrogance et deviennent des divas.
La photographie culinaire a désormais ses stars : Frank Hermel, Caroline Faccioli, Matt Armendariz et beaucoup d’autres (ce site en a recensé un grand nombre). Elle a aussi ses vitrines mondiales, à l’instar du Festival international de la photographie culinaire qui confronte les création de milliers de photographes à travers la planète.
Crédit photo : http://www.studio-photo-dordogne.fr/
5. Dans les secrets de l’imagerie culinaire
Le photographe déploie tout un tas de techniques qui lui permettent de mettre en valeur le produit. Son maître-mot : le storytelling. Il s’agit de raconter une histoire à celui qui regarde la photo. Et pour raconter une histoire, il faut d’abord la mettre en scène. C’est ainsi que le métier de photographe culinaire s’apparente à celui de réalisateur de film, et suit les mêmes étapes :
- Scénariser son plat : le disposer avec élégance, positionner les aliments dans l’assiette de la meilleure façon, équilibrer les formes et les couleurs.
- Décorer son plat, en harmonisant les aliments avec la vaisselle qui les accueille.
- Éclairer sa scène en privilégiant la lumière naturelle.
- Mettre en scène son plat : varier les plats et les accessoires, diversifier les prises de vues, les angles, les échelles de plans, les focales, la profondeur de champ.
Et, enfin, manger ! Car un plat, ça se déguste en fin de séance photo. C’est la preuve qu’il était tellement appétissant qu’il en devenait irrésistible. Et c’est le seul domaine de la photographie où l’artiste est autorité à dévorer son modèle !